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L'ŒNOLOGIE POUR TOUS : LA VINIFICATION
LA VINIFICATION EN BLANC

Le rôle essentiel des opérations préfermentaires

A la différence des vins rouges, qui sont obtenus par fermentation alcoolique en présence du marc, les vins blancs sont obtenus par fermentation du seul jus de raisin, après pressurage et clarification du moût, donc indépendamment de la couleur du cépage (cf. le Champagne « blanc de noir »).

Pour autant, même dans le cas extrême où elle se résume à la phase du pressurage, l'élaboration du vin blanc ne peut faire l'économie d'une courte phase de macération préfermentaire en présence du marc. Cette phase est même indispensable dans la mesure où les arômes variétaux et les précurseurs d'arômes sont surtout situés dans la pellicule du raisin et doivent donc pouvoir passer dans le moût. Mais d'un autre côté la pellicule est également la partie la plus riche en substances à odeurs herbacées et en saveurs amères qu'il faut au contraire éviter d'extraire lors de cette même macération. Réussir une vinification en blanc signifie donc parvenir à extraire un optimum de composés intéressants pour les qualités organoleptiques du vin tout en limitant au maximum l'extraction d'éléments pouvant constituer des défauts, sans possibilité de corrections d'éventuelles erreurs commises durant cette phase préfermentaire. Selon les caractéristiques du cépage et la qualité du raisin, la durée idéale de cette phase se situe entre quelques heures et -exceptionnellement- quelques jours. Contrairement à ce qu'il se passe pour la vinification en rouge, la qualité d'un vin blanc est donc déjà quasiment entièrement déterminée dès avant le stade de la fermentation alcoolique.

Même le choix de vinifier en cuve ou en barrique se fait très tôt : en effet, pour ne pas être trop boisé par le fût, à la différence d'un vin rouge, un vin blanc « sous bois » ne doit pas seulement être élevé en barrique, mais y être vinifié dès le départ afin d'obtenir un meilleur fondu entre le bois et le vin.

La clarification du moût offre un autre exemple de choix définitif sur lequel le vigneron ne peut plus revenir. Le débourbage doit en effet être suffisamment précoce pour éviter les odeurs végétales et réduites, mais suffisamment tardif pour permettre la libération de substances indispensables à la bonne marche de la fermentation. Dans un cas comme dans l'autre, il est quasiment impossible de stimuler la fermentation d'un moût trop clarifié ou d'éliminer le côté végétal d'un vin mal ou trop tard débourbé.

Les divers types de vins blancs

Comme les vins rouges, les vins blancs peuvent être de type primeur ou de garde, boisés ou non boisés, mais pour un même cépage, ils peuvent aussi se distinguer en sec ou moelleux selon la date de la vendange, avec des taux d'acidité pouvant varier du simple au double.

Aujourd'hui, quatre types de vins blancs secs prédominent :

Les vins blancs neutres sans arôme variétal particulier.

Ils sont produits à partir de cépages eux-mêmes très neutres, tels l'ugny blanc ou le maccabeu, ou à partir d'autres cépages plus nobles mais ayant perdu leurs caractéristiques à cause d'une culture trop productiviste et/ou d'un terroir non approprié. Ils ne possèdent donc que les arômes secondaires communs dus à la fermentation alcoolique (esters éthyliques et acétates d'alcools supérieurs) et se boivent jeunes pour leur fraîcheur désaltérante.

Les vins de chardonnay :

Ils constituent le principal standard des vins blancs internationaux. Cela est dû d'une part au rayonnement du modèle

bourguignon, et d'autre part à la grande adaptabilité du chardonnay à la plupart des grandes régions viticoles du monde. Les principales caractéristiques des grands blancs bourguignons sont la concentration des baies, à la fois sucrées (13% d'alcool potentiel) et acides (pH entre 3,1 et 3,3), fermentées en fûts et élevées sur lies, donnant des vins particulièrement aptes au vieillissement au cours duquel ceux-ci développent un remarquable bouquet de réduction.

Les vins de sauvignon de type Loire :

A l'arôme typique souvent intense, ils constituent un autre standard mondial. Plus dépendant de son terroir et de son climat de prédilection, l'expression aromatique typique du sauvignon est toutefois plus difficile à reproduire et son aptitude au vieillissement est moindre que chez le chardonnay. Il ne subit généralement pas de malolactique et, dans le Bordelais, il est associé au sémillon, auquel il apporte son fruit et sa fraîcheur. A l'instar du chardonnay, les meilleurs sauvignons sont fermentés en barriques et élevés sur lies.

Les vins de cépages très aromatiques se limitant très fortement à leur région d'origine :

Parmi les cépages blancs, certains (comme les différents muscats, le gewürztraminer alsacien ou allemand, le chenin de Loire, le viognier de Condrieu ou le petit et gros manseng du Jurançon) ont un parfum primaire très présent dans les baies elles- mêmes, principalement dû à la présence de certains terpènes et terpénols qui leurs sont propres. D'autres cépages, comme le chardonnay, le sauvignon ou le chenin, ont des moûts peu odorants mais produisent des vins possédant pourtant un arôme variétal très caractéristique. Cela est dû à leur teneur en précurseurs d'arômes inodores qui ne se manifestent que durant la fermentation.

Les arômes secondaires, qui apparaissent durant la fermentation alcoolique et qui, pour la plupart, sont davantage communs à tous les vins blancs, sont aussi les plus instables et les plus fugaces. On voit par-là que la qualité d'un vin blanc repose avant tout sur la finesse et la typicité de ses arômes propres, expression de son cépage, que l'on obtient seulement par une parfaite qualité et maturité de la vendange.

Importance de l’état sanitaire du raisin

En raison de leur plus grande précocité, les cépages blancs sont beaucoup plus exposés au risque de pourriture grise que les cépages rouges. Or une petite quantité de baies touchées suffit déjà à dégrader fortement, par oxydation, les composants aromatiques primaires du cépage, tels que les terpénols, ainsi que les précurseurs d'arômes, annihilant ainsi les parfums primaires et secondaires du vin blanc. Elle apporte en outre de graves défauts organoleptiques, tels que des odeurs rances, cireuses ou camphrées. Pour les vins blancs plus encore que pour les vins rouges, un tri manuel très sévère à la vigne s'impose donc avant ou lors de la vendange.

Paradoxalement, la pourriture noble non seulement n'affecte pas ces arômes variétaux mais parfois même les exalte, conférant aux sémillons et sauvignons de Sauternes leurs parfums orangés et citronnés, ou leur parfum de litchi aux sélections de grains nobles du gewürztraminer alsacien.

Inversement, le passerillage, qui se contente de concentrer le raisin en le desséchant, lui fait perdre son arôme spécifique pour lui conférer à la place celui de raisin sec, peu différent d'un cépage blanc à l'autre.

D'autres formes de pourritures, telles que « pourriture aigre » ou « acide », encore plus dangereuses que la pourriture grise, affectent les climats chauds et humides, obligeant quand elles se déclarent à récolter avant terme, tout en sacrifiant une bonne partie de la vendange.

La maturité et la fixation de la date de la vendange

La maturité d'une vendange, qu'elle soit blanche ou rouge, est toujours difficile à définir car elle est un compromis entre plusieurs maturités : la maturité quant au taux de sucre n'est pas la maturité quant au taux d'acidité, ni non plus la maturité phénolique. La maturité idéale, appelée souvent « maturité aromatique » recherchée dans un vin blanc est donc un savant arbitrage entre toutes ces maturités, sachant qu'elle dépend non seulement du cépage et du terroir mais aussi du millésime et du type de vin que l'on cherche à produire. Le mûrissement des grappes entraîne à la fois une baisse des composants herbacés que l'on cherche à éviter et une hausse des arômes et précurseurs d'arômes que l'on cherche au contraire à développer, mais en revanche un surmûrissement est contreproductif pour un vin blanc sec dans la mesure où il s'accompagne d'une perte d'arômes. Fixer scientifiquement la date idéale de la vendange afin d'exploiter ce bref instant d'équilibre où l'expression aromatique potentielle a atteint son apogée est théoriquement possible, mais pratiquement infaisable en raison du coût et des délais propres à ces analyses en laboratoire.

Le viticulteur en est conduit à se fier aux critères traditionnels semi empiriques auxquels il est habitué, à savoir : les contrôles classiques de maturité (poids des baies, mesure du taux de sucre et de l'acidité des baies), les dates de demi floraison et demi véraison et, in fine, l'indispensable dégustation des raisins. Les meilleurs terroirs pour produire des grands vins blancs de garde sont ceux où le taux d'acidité ne baisse que lentement en cours de maturation, gage d'une plus longue préservation du fruité du cépage et donc d'une meilleure simultanéité des diverses maturités du raisin. Cela exclut les climats trop chauds, ainsi que les années de trop grand stress hydrique, qui produisent des millésimes trop précoces chez lesquels une maturation trop rapide n'a pas donné aux arômes le temps nécessaire pour se développer pleinement.

Les vendanges

La récolte d'un vin de qualité impose des règles très strictes, tout particulièrement dans le cas des vins blancs dont l'arôme est encore plus sensible que celui des vins rouges à l'oxydation et donc plus facilement menacé par des défauts olfactifs contractables en phase préfermentaire.

- En amont de la vendange, la vigne a subi une « taille raisonnée » (limitation du nombre de bourgeons, suppression des contre bourgeons et des entre-cœurs), voire un éclaircissage « en vert » (= suppression des grappes en surnombre avant qu'elles ne mûrissent) afin de limiter l'entassement de ces dernières.

- Au voisinage de la véraison, la vigne bénéficie d'un effeuillage autour des grappes qui favorise leur ensoleillement. Autant de mesures préventives qui assurent à la fois un bon état sanitaire du raisin et une maturité plus homogène dans toute la parcelle.

- A leur réception en cave, les baies doivent être restées intactes pour empêcher l'oxydation du moût et la macération des rafles.

- La récolte doit se faire en dessous de 20° C, donc tôt le matin voire la nuit dans les régions chaudes, tout en évitant l'humidité des grappes.

- Quand la maturité des raisins n'est pas homogène dans la parcelle, ou en cas d'apparition ponctuelle de pourriture grise, il faut pratiquer plusieurs passages : au moins un premier pour couper et laisser sur le sol les grappes pourries, un second pour ne récolter que les grappes mûres (en général, c'est cette première cueillette qui produit les meilleures cuvées), les raisins verts n'étant pas cueillis dans l'attente d'un prochain passage. A l'inverse, une seule cueillette de raisins inégalement mûrs donne des vins très inférieurs à ce qu'ils pourraient être.

- Pour cette même raison, mis à part les cas très rares d'une récolte parfaitement saine et d'une maturité homogène, la vendange mécanique ne peut être aussi qualitative que la vendange manuelle. A tout le moins, il convient d'éviter l'oxydation des baies ainsi récoltées par l'utilisation en continu de la neige carbonique par la machine et surtout pas par du SO2 qui favoriserait l'extraction des composés phénoliques herbacés.

L’extraction du moût

La phase préfermentaire des vins blancs comprend celle du pressurage, suivie de celle du débourbage.

Dès la phase de pressurage, le jus produit doit être le plus clair possible (idéalement 200 NTU), car une présence trop forte de bourbes témoigne d'un traitement mécanique trop brutal du raisin qui a fait passer dans le moût une quantité trop grande de constituants herbacés propres à en dénaturer le goût, tels que la catéchine et l'épicatéchine, ou tels que le potassium des parties solides qui augmente le pH du moût au-delà du souhaitable. Durant tout ce processus, le degré d'oxydation du moût, le degré d'extraction des composés phénoliques ainsi que l'élévation du pH peuvent être contrôlés par des analyses spécifiques.

Un résultat optimal suppose que soient satisfaites les conditions suivantes :

- La pression exercée sur la vendange est basse

- les actions mécaniques susceptibles de froisser les pellicules (tels que les rebêchage et émiettage) sont limitées

- la montée en pression dans le pressoir est lente et progressive

- le volume de jus extrait à basse pression est important

- l'extraction des jus se fait à une température inférieure à 20° C.

- Les jus séjournent le moins possible à l'air, mais sont rapidement mis à l'abri de l'oxygène et sulfités.

Parmi les diverses méthodes d'extraction, celle qui permet de traiter rapidement les plus gros volumes, mais qui est aussi la moins qualitative, est l'extraction immédiate en continu après foulage. L'extraction discontinue sans foulage en grains ronds est un bien meilleur procédé, surtout si le pressoir, au lieu d'une cuve perforée, est muni d'une cuve étanche qui protège de l'oxydation, protection encore plus indispensable si une macération pelliculaire est pratiquée avant pressurage.

Mais c'est le pressoir pneumatique autoprogrammable qui répond le mieux à l'ensemble des critères de qualité d'une bonne extraction.

Le moût des premières phases de presse est de meilleure qualité que celui des dernières presses, obtenu par des pressions plus élevées après rebêchage, mais plus le raisin est sucré, aromatique et de pH bas, plus l'adjonction de jus des presses suivantes est de nature à l'améliorer, comme le montre l'exemple des grands Graves bordelais.

Les grappes sont généralement pressées entières car, indépendamment du risque de triturage des baies que comporte cette opération, la présence des rafles dans le pressoir facilite l'écoulement et limite la teneur des moûts en protéines thermo- instables.

Il en est de même pour le foulage : à l'inverse de l'extraction des moûts de vins rouges, les grains blancs ne sont pas foulés afin de limiter la contamination du moût par les substances herbacées astringentes provenant des parties solides.

Cas particulier de la macération pelliculaire en blanc

Pour les raisons évoquées ci-dessus, la phase du pressurage dans laquelle le moût d'un blanc se trouve inévitablement en contact avec ses parties solides est le plus souvent réduite à un minimum. Pourtant, dans certaines conditions, cette phase est délibérément prolongée en une véritable macération pelliculaire. A la condition que la vendange soit parfaitement saine et mûre, une macération pelliculaire permet à certains cépages, tels que le muscat ou le sauvignon, de libérer davantage de composés aromatiques ou préaromatiques sans pour autant extraire de substances nuisibles à la qualité du vin.

Pour ce faire, une cuve étanche, ou le pressoir étanche lui-même, sous atmosphère inerte (CO2 ou azote) sont remplis d'une vendange éraflée et modérément foulée, et la température est maintenue à 15° C durant toute la durée de la macération, après quoi le raisin est pressé.

Cette macération permet une meilleure exploitation du potentiel aromatique variétal de la vendange, qui peut être mesuré par le dosage des terpénols libres et liés dans les vins de muscat, ou des 4-mercapto-4-méthylpentan-2-one à l'odeur de buis dans les vins de sauvignon.

Elle s'accompagne d'une diminution de l'acidité, grâce à l'augmentation du taux de potassium extrait des pellicules et à la salification partielle de l'acide tartrique qui en résulte. Le moût se trouve également enrichi en acides aminés qui favorisent sa vitesse de fermentation, mais aussi en polysaccharides et protéines qui entraînent la nécessité de doses plus élevées d'argile bentonite pour stabiliser le vin ainsi produit.

La cryosélection de la supraextraction

La cryosélection consiste à presser les vins à -2° C ou -3° C de sorte à n'extraire que les jus les plus sucrés, moins congelés, ce qui permet, dans une récolte dont la maturité n'est pas homogène, de n'extraire d'abord que le jus des grappes au degré de maturité le plus avancé, et seulement dans un deuxième temps, après décongélation, celui de moins bonne qualité provenant de grappes insuffisamment mûres.

La supraextraction consiste à congeler puis décongeler la vendange entière afin d'obtenir une déstructuration partielle des parties solides propre à mieux libérer les arômes et précurseurs d'arômes du raisin. L'effet est donc comparable à celui obtenu par une macération pelliculaire, avec toutefois l'avantage d'une extraction plus faible des composés phénoliques herbacés. A ce titre elle représente une technique favorable à l'expression aromatique de certains grands cépages blancs. Elle reste cependant d'un usage limité en raison de sa lenteur et de son coût.

La protection des moûts contre l’oxydation

Durant la phase préfermentaire, le contact du moût avec l'oxygène entraîne un brunissement et une perte d'arôme.

Pour autant, un moût totalement protégé donne un vin ensuite beaucoup plus sensible à l'oxydation. Un certain degré d'oxydation est donc parfois délibérément recherché, car étant donné que ce sont les polyphénols qui sont les premiers composants oxydables dans le moût, ces éléments indésirables et responsables du brunissement précipitent sous l'effet de l'oxygène et sont donc éliminés avant même la fermentation alcoolique.

Mais en ce qui concerne les arômes variétaux, il n'en reste pas moins vrai que l'oxydation du moût a, selon les cépages, soit un effet nul soit un effet nettement négatif. C'est la raison pour laquelle la protection du moût contre l'oxygène reste un souci majeur du vinificateur de vins blancs.

L'oxydation du moût est due à une activation de son oxygène par une enzyme oxydasique : la tyrosinase du raisin sain, et la laccase de la pourriture grise. L'oxydation par tyrosinase est tellement rapide et brutale en début d'exposition, qu'il est matériellement impossible de l'éviter complètement. Mais une fois que son principal substrat, l'acide caftarique, est épuisé dans le moût, elle ralentit très fortement. Celle par laccase en revanche est beaucoup plus dangereuse car son effet est prolongé, elle dégrade un grand nombre de composants essentiels du moût et doit donc impérativement être stoppée par un sulfitage adapté.

Les principales techniques de protection des moûts contre l'oxydation sont les suivantes :

- Le sulfitage (effet à la fois antioxydant et antioxydasique). 50 mg/l, à apporter en une seule fois, suffisent pour protéger une vendange saine. Mais il doit être pratiqué seulement après le pressurage car appliqué sur la vendange elle-même, il favorise l'extraction des composés phénoliques indésirables. De même, un ajout trop massif ou trop tardif de SO2 est contreproductif car il favorise la production de composés soufrés par la levure.

- L'addition d'acide ascorbique (effet antioxydant) à raison de 10 g/hl. Mais il ne peut être employé seul car, ne possédant pas d'activité antioxydasique, il ne fait que retarder le brunissement.

- Le froid (qui ralentit la vitesse d'oxydation) est un précieux complément au sulfitage, dont il permet de réduire les doses. De plus, en dessous de 0° C, la destructuration des baies qu'il entraîne aide à libérer encore plus facilement les composants aromatiques.

- L'usage de gaz neutres comme le gaz carbonique ou l'azote. L'usage de la neige carbonique permet même de conjuguer l'action du froid à celui du gaz inerte.

- La destruction des oxydases par la chaleur. Peu utilisé dans la pratique, il n'est efficace que s'il intervient immédiatement après l'extraction et si la montée en température est très rapide.

- Le débourbage précoce. Il n'offre pas une protection complète, mais il permet au moins l'élimination des produits d'oxydation du moût ainsi que celle des oxydases présentes dans les bourbes.

Le débourbage

Les bourbes confèrent au vin lourdeur, turbidité et astringence, ainsi que de fortes odeurs de réduction. A l'inverse, leur élimination précoce renforce le caractère fruité du vin (notamment par de plus faibles teneurs en alcools supérieurs à odeur lourde, et de plus fortes teneurs en esters éthyliques d'acides gras et en acétates d'alcools supérieurs aux arômes agréables), ainsi que la stabilité de sa couleur.

Inversement un vin très débourbé (< 50 NTU) non seulement rencontre des difficultés de fermentation (puisque les bourbes représentent pour les levures une réserve d'aliments et d'agents protecteurs) mais paradoxalement il accuse également un déficit en arômes, de sorte que, dans la pratique, le taux idéal de turbidité du moût se situe entre 100 et 150 NTU.

Le procédé de débourbage le plus employé est la simple décantation. Dès la fin du pressurage, il est conseillé d'éliminer, par pompage du moût surnageant dans la partie supérieure de la cuve, le dépôt constitué précocement par les bourbes les plus grossières. Celles des dernières pressées, de couleur très brune, sont à éliminer définitivement. En revanche, les bourbes grossières des premières pressées sont très fermentescibles et, une fois filtrées et clarifiées, elles peuvent très utilement être réintégrées au moût.

Le plus souvent, une deuxième décantation est nécessaire, accompagnées par un refroidissement de la cuve entre 5° C et 10° C.

Le contrôle de la turbidité optimale est facilité par l'emploi d'un néphélomètre. Une clarification trop poussée peut alors être rapidement corrigée par une réincorporation de bourbes fines.

Les moûts des dernières pressées sont nettement plus difficiles à clarifier. Si on désire les incorporer aux jus des premières pressées, leur clarification rend souvent nécessaire l'usage de pectinases industrielles car, leurs bourbes fines étant de très mauvaise qualité, il faut d'abord descendre jusqu'à une clarification de 10 ou 15 NTU, avant de leur réincorporer les bourbes fines des premières pressées afin d'atteindre l'optimum de 100 à 150 NTU. Tous ces ajustements concernant la turbidité idéale sont fastidieux mais ils sont d'une importance stratégique tant pour le bon achèvement de la fermentation que pour la qualité aromatique des grands vins blancs secs.

L'assemblage des moûts de presse aux moûts de goutte est également déterminant pour la qualité du vin. Une couleur trop foncée ou un indice phénolique trop élevé, une trop forte teneur en sucre ou un Ph supérieur ou égal à 3,5 rendent un moût de presse impropre à un assemblage avec un moût de goutte. Mais dans le cas contraire, il renforce significativement l'arôme variétal du moût de goutte, notamment chez le sauvignon. Il est dans ce cas préférable de pratiquer l'assemblage avant le départ de la fermentation alcoolique.

Les autres procédés de clarification du moût (par centrifugation ou filtration, directe ou tangentielle) sont certes plus rapides mais ils donnent toujours de moins bons résultats que la simple décantation (risques d'oxydation ou de dépouillement du moût). Ils sont du reste de plus en plus rendus obsolètes par la généralisation du pressurage pneumatique.

Les volumes de dépôts bourbeux obtenus par le procédé classique de la décantation représentent une proportion non négligeable de la récolte, mais une clarification des bourbes, par des filtres à bourbes appropriés, permettent d'en extraire jusqu'à 90% de jus clairs de qualité, que l'on réintègre alors au moût original dont sont extraites ces bourbes.

C'est après le débourbage que l'on peut pratiquer sur le moût certaines corrections concernant la teneur en sucre ou l'acidité. A ce stade, une clarification définitive du moût à l'argile bentonite est déconseillé, car elle n'offre pas la même stabilité que lorsqu'elle est pratiquée après fermentation sur le vin destiné à être mis en bouteille. Pour les vins destinés à un élevage sur lies, elle serait même contreproductive car elle annihilerait une grande partie des agents aromatiques.

La conduite des fermentations

L'assemblage de différents moûts débourbés provenant de différentes cuves doit se faire en respectant l'intégrité des différents moûts, donc en réincorporant à l'ensemble la totalité des fonds de cuves, y compris les bourbes fines qui ont pu s'y déposer après décantation.

Il faut éviter de mélanger des moûts en fermentation avec des moûts non encore en fermentation (production de H2S par les levures du moût en fermentation en présence du SO2 libre de l'autre moût).

La fermentation spontanée d'un vin blanc par ses levures indigènes est assez aléatoire, compliquée par le fait que les différents débourbages s'accompagnent automatiquement d'un certain « délevurage ». Or une fermentation difficile donne toujours un vin terne. La première qualité d'une levure pour un vin blanc est donc son aptitude à assurer une fermentation complète d'un moût d'une turbidité comprise entre 100 et 200 NTU et d'un taux de sucre pouvant atteindre 220 g/l. Comme une telle aptitude à fermenter des jus aussi clarifiés n'existe que rarement chez les levures indigènes, l'utilisation des levures exogènes (LSA) s'est généralisée. Il en existe communément une trentaine en usage pour les vins blancs.

Certaines LSA produisent des quantités élevées d'esters caractéristiques de l'arôme secondaire de fermentation. Elles sont, pour cette raison, indiquées pour les vins de cépages neutres, et déconseillées pour les cépages aux arômes variétaux plus fruités, qu'elles couvrent et banalisent.

Pour ces derniers, il est important pour le vigneron de connaître l'incidence de la LSA sur la typicité des vins qu'il élabore : une bonne levure est une levure qui permet de transformer les arômes potentiels d'un cépage, contenus dans ses précurseurs d'arômes, en arômes libres, sans les minorer, ni les masquer par un excès d'arômes fermentaires, ni même les caricaturer en exagérant certains à outrance au détriment d'autres.

Pour leur alimentation, les levures ont besoin d'azote (sous forme de cation ammonium et d'acides aminés), qu'elles trouvent généralement dans le moût lui-même. Dans certaines conditions toutefois, comme une alimentation de la vigne insuffisamment azotée ou une année de sècheresse, les moûts peuvent se retrouver carencés en azote. Or de tels moûts donnent généralement des vins lourds, peu fruités et prématurément vieux. On admet donc qu'en dessous de 25 mg/l de cation ammonium ou 160 mg/l d'azote assimilable, un moût blanc doit être supplémenté en azote par addition de sulfate d'ammonium. Ce taux d'azote assimilable peut facilement être contrôlé par une détermination de l'indice de formol calculé à l'aide d'un pHmètre. Dans tous les cas, une carence chronique en azote gagne à être corrigée préventivement au vignoble par des pratiques agronomiques appropriées plutôt qu'à posteriori par une correction apportée sur le moût.

Cet azote ammoniacal est ajouté dès le levurage, soit de préférence en deux fois au levurage puis trois jours plus tard.

Les levures ont aussi besoin d'oxygène qui, en phase de fermentation, peut être apporté au moût car, à ce stade, le fort pouvoir réducteur des levures protège les arômes de tout danger d'oxydation. Seuls les arômes fermentaires, moins intéressants que les arômes variétaux, peuvent être affectés par l'accélération de la fermentation qu'apporte une supplémentation en oxygène.

Plus la turbidité du moût est faible et plus sa teneur en sucre est élevée, plus cet apport a de chance d'être nécessaire. Le moment le plus favorable se situe dans les premiers jours, pendant la phase de multiplication des levures, soit par remontage soit par microbullage.

La maitrise de la température dans le cadre d'une vinification en fût dans une cave dont la température se situe entre 12 et 16° C est facile et permet d'assurer une fermentation aux températures idéales du moût comprises entre 22° C et 25° C.

Il en va autrement dans les cuves de grand volume, qui doivent être refroidies sans à-coups thermiques afin de reproduire ces températures idéales de fermentation. Au-delà de 30° C on constate en effet des pertes d'arômes accompagnant un dégagement plus important de CO2.

La fermentation d'un vin blanc dure environ 10 jours et, sauf dans le cas de moûts très riches en sucre, un allongement de cette période est plutôt le signe d'un problème qui doit être rapidement corrigé. Le bon déroulement de la fermentation peut être contrôlé par une mesure quotidienne de la densité : lorsque celle-ci tombe à 0,994, il faut s'assurer par un dosage du sucre résiduel (soit moins de 2g/l de sucres réducteurs) que la fermentation est bien achevée. Un ouillage des récipients est alors pratiqué pour y chasser à nouveau l'oxygène.

Si la malolactique n'est pas désirée, la température en cuve est abaissée à 12° C et, dans l'attente du sulfitage qui intervient après une ou deux semaines, les lies sont quotidiennement remises en suspension par agitation ou pompage (en veillant à ne pas introduire d'oxygène) afin d'utiliser au mieux le pouvoir réducteur des lies de levure tout en évitant l'apparition d'odeurs réduites dans les lies. Cette précaution permet d'élever un vin blanc sur lies même dans de grandes cuves.

L'éventualité et la conduite de la fermentation malolactique

A la différence des vins rouges, la malolactique n'est pas toujours désirée en blanc car elle entraîne un affaiblissement des caractères fruités de beaucoup de cépages, tels que le sauvignon, sémillon, chenin ainsi que de toutes les variétés alsaciennes. En revanche, elle est indispensable au chardonnay, non seulement pour faire baisser son taux d'acidité naturellement élevé sous les climats tempérés tels que celui de la Bourgogne (>7 g/l en équivalent H2SO4), mais principalement pour achever sa plénitude aromatique. Sous les climats plus chauds sous lesquels le chardonnay atteint des degrés d'acidité moindres, il arrive même que les vignerons acidifient artificiellement leurs moûts de chardonnay uniquement pour que leur vin puisse subir ensuite une malolactique.

Lorsque la malolactique est souhaitée, le vins sont maintenus sur lies après leur fermentation alcoolique, sans sulfitage, dans des récipients soigneusement ouillés pour protéger le vin de l'oxygène, à des températures comprises entre 16° C et 18° C, et les lies sont bâtonnées toutes les semaines pour elles aussi mieux protéger le vin de toute oxydation. Dans ces conditions, la malolactique ne tarde pas à démarrer d'elle-même, car dans les caves où la malolactique est systématiquement pratiquée, les souches ont tellement colonisé les lieux qu'il serait plus difficile d'empêcher son départ que de le provoquer. Dans le cas contraire, l'utilisation de levains malolactiques industriels permet de déclencher des malolactiques qui ne démarreraient pas naturellement.

L'élaboration de vins blancs secs en barrique

Contrairement au vin rouge qui peut être entonné après les fermentations, un vin blanc élevé en barrique doit impérativement fermenter dans la barrique dans laquelle il sera ensuite conservé, sur lies totales, pendant plusieurs mois, sans soutirage.

Cette nécessité d'une fermentation en barrique s'explique notamment par le fait que les ellagitanins du fût, ne pouvant se combiner avec la masse de polyphénols qu'ils rencontrent dans le vin rouge, dénatureraient les arômes du vin blanc en l'hyperboisant. Mais en présence des levures dans la phase fermentaire puis dans les lies, ces ellagitanins se combinent avec les mannoprotéines des parois des levures et, en perdant leur agressivité, ils confèrent au contraire au vin un caractère plus gras et plus moelleux.

Par leurs effets réducteurs, les lies protègent également le vin contre l'oxydation, responsable du rosissement qui peut survenir durant les traitements de stabilisation ou de mise en bouteille (à moins que le vin ait reçu une adjonction de 10g/hl d'acide ascorbique lors de son embouteillage). Les lies semblent donc jouer pour le vin blanc le même rôle protecteur antioxydant que les tanins du vin rouge. Et même une fois complètement clarifié lors de sa mise en bouteille, un vin blanc élevé sur lies semble mieux protégé contre le risque de vieillissement prématuré en bouteille.

La maîtrise des défauts de réduction dans les vins blancs secs reste une préoccupation majeure du vigneron (apparition d'odeurs d'hydrogène sulfurés et de mercaptans très désagréables). Après sulfitage, des amas de lies qui ne seraient pas régulièrement brassées produisent en effet rapidement des déformations sulfurées dangereuses pour le vin, au point d'imposer un soutirage définitif d'urgence. C'est ce qui rend impossible l'élevage sur lies en cuve, milieu hermétique, donc naturellement réducteur, et par ailleurs plus difficile à homogénéiser. La seule parade consiste à soutirer le vin et à ne lui réintroduire ses lies que quelques semaines plus tard, lorsqu'elles ont perdu leur activité réductrice.

A l'inverse, par la microoxygénation que permettent les pores des fûts neufs et l'action oxydante de ses ellagitanins, le fût neuf représente au contraire un milieu naturellement oxydatif, donc propre à équilibrer cette action réductrice des lies. Il est, de plus, aisément homogénéisable par bâtonnage.

Cet effet oxydatif est bien sûr moindre dans un fût usagé qui, par l'obstruction partielle de ses pores et ses moindres relargages d'ellagitanins, protège moins contre l'apparition de défauts de réductions de ses lies, d'où dans ce cas la nécessité encore plus impérieuse d'un bâtonnage régulier.

A l'inverse, un vin blanc élevé en fût neuf sans ses lies perd sa protection réductrice contre l'oxydation, et donc rapidement son fruit.

SI les grands vins blancs puissants de garde tirent un grand profit d'une vinification en barrique sur lies, il n'en va pas de même pour les vins légers, vifs et fruités destinés à être bus jeunes, qui y perdraient au contraire leur expression aromatique propre. Les bois à grain fin type Allier, dont les tanins sont moins agressifs que les bois à grain moyen type Limousin, sont plus adaptés aux vins blancs. Pour éviter que leur plus forte teneur en composés odorants couvre les arômes délicats des vins blancs, un niveau de chauffe au moins moyenne sinon forte s'impose. Cette teneur en composés odorants est même si forte chez le chêne américain que celui-ci est fortement déconseillé pour les vins blancs.

Lors de l'entonnage, les fûts doivent être placés dans une cave idéalement à 16° C, remplis soit avant soit au tout début de la fermentation alcoolique sans mélanges de moûts fermentants et non fermentants, avec un espace de 10% du contenant pour éviter les débordements de mousse en fermentation. De plus, il faut veiller à entonner un moût homogène, donc à bâtonner soigneusement avant entonnage, puis à veiller en fin d'opération à ce que toutes les barriques reçoivent la même proportion de lies de fond de cuve.

Si les moûts sont entonnés non fermentés, il faut assurer lors du départ en fermentation l'oxygénation nécessaire à sa bonne marche.

Par la suite, bâtonnage et ouillage sont hebdomadaires, en veillant à un maintien du taux de SO2 libre à 30mg/l.

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